Slow-dye

Teintures végétales pour les curieuses et les flemmardes
  

30.7 Teindre en roses et rouges avec des végétaux glanés au bord des routes (bourdaine, bouleau, rumex, rhubarbe)

Suite du billet sur les macérations alcalines à la Jenny Dean
selon son livre "A Heritage of Colour"


laine tout à droite: rhubarbe; à sa gauche: bourdaine
en bains alcalins

(le reste de la photo: sous bains de garance)

Ecorces de bouleau

Les feuilles donnent du jaune, mais l'écorce donne un rose indien ravissant. DC rappelle que les marins de la Baltique teignaient leurs filets en "rougeâtre" avec l'écorce de bouleau, ce qui signifie que la couleur doit être drôlement résistante.

Ajout novembre: je viens de retrouver la source dans un livre de Leuchs:

Récolte

Idéalement avant l'été, au printemps, pour la richesse en principes actifs (check?).
Prélever sur des branches cassées ou élaguées l'écorce intérieure et l'aubier du bouleau.
Tailler à la broyeuse de jardin. Ou acheter les écorces broyées chez Alysse créations.

Extraire le jus de teinture

Je ne cuis pas l'écorce de bouleau comme dans les recettes classiques, je la fais macérer à température ambiante (même en hiver) dans un seau, dans une solution alcaline à un pH de 9 à 10.

Je basifie avec de l'eau de cendres quand j'en ai, sinon des cristaux de soude que j'ai prédilués dans de l'eau bouillante (du robinet). Le pH doit être très élevé pour commencer car la solution va s'acidifier rapidement.

Surveiller de jour en jour que la cuve reste à au moins 9 de pH. On peut garder très longtemps cette solution avant de l'utiliser, tant qu'elle reste à un pH de plus de 8.

Ma version: après 2 jours, je filtre le jus, que je conserve; je rajoute une solution alcaline sur les écorces et je laisse macérer encore 48 heures. Je réunis les deux pour teindre = double extraction.

Le bain de teinture

Il faut au moins vingt fois le volume d'eau par rapport à la fibre à teindre. Je dois rarement compléter le bain puisque j'ai déjà procédé à deux extractions.

La laine

Il ne faut pas mordancer, puisque le bouleau est très riche en tanins.

On peut la teindre au bouillon, mais je teste à froid pour des raisons éconologiques.

J'enferme la laine à teindre dans un bas nylon, je la laisse tremper, en la gardant submergée à l'aide d'un bol céramique. Autre solution: j'accroche aux bords du seau un nylon, je trempe la laine dans ce nylon, je pose un poids. L'essentiel est qu'elle ne touche pas les écorces, sinon macache le nettoyage après.

48 heures suffisent pour une belle prise de couleur. L'alcalin à froid ne semble pas abîmer la laine comme il le ferait à chaud.

Ma version au pif: une fois par jour, je sors la laine (d'où ma préférence pour le linge nylon plutôt que le bas). Je la laisse s'oxyder à l'air une heure. Je la replonge. Je suis la méthode des Japonais, à l'instinct, mais je ne suis pas sûre de ce qu'il se passe réellement lors de ces oxydations répétées.

Je laisse sécher sans rincer. Je ne rince qu'après 24h. Je ne termine pas par un rinçage vinaigré comme d'habitude sinon le rouge se ternit.

Comprendre

Les écorces, comme le noyau d'avocat, sont riches en phlobotanins qui se révèlent en conditions alcalines puis par exposition à la lumière.

Résistance lumière

Je ne me préoccupe pas trop de la résistance lumière, les tanins sont fiables en général.

J'utilise ce bain permanent (puisqu'alcalin), disons une cuve de bouleau, comme complément dès que je teins en campêche. Mes premiers tests indiquent une belle résistance à la lumière des fibres campêchées si je les combine à du bouleau, contrairement à la réputation de fugacité. Ce ne sont que des tests ménagers, certes.

On peut aussi utiliser l'écorce de bouleau comme mordant. Leena du blog Riihivilla a testé la résistance lumière de la laine en garance, mordancée alun, versus la même à l'écorce de bouleau (2 semaines, au soleil). Positif: quasi pas de différence. Voir les photos sur sa page

Ecorce de bourdaine et racines de rhubarbe

J'ai testé des rameaux de Frangula alnus alias bourdaine, qui est aussi commune en Belgique. Dans un premier temps, j'avais acheté 500g chez Michel Garcia. Ensuite, je récolterai en forêt. Bourdaine: voir photos

J'ai testé des racines de rhubarbe achetées chez le même fournisseur.

Dans les deux cas, la laine sort rousse, mais elle rougit fort à l'air.

Pour les deux végétaux, même procédé alcalin à froid et même couleur rougeâtre que l'écorce de bouleau. A ceci près qu'après séchage il faut bien laver en pH neutre ou un peu alcalin, car la moindre tache d'acidité fait retourner la couleur au jaune. En tableau (non lavable), je pourrais tirer des lignes ou dessiner au vinaigre, pour un effet jaune flash sur fond rouge brique.

Résistance lavage: en réalité, les vêtements en laine ne doivent pas se laver. Le majordome du prince Charles rappelle dans une interview que "jamais au grand jamais il ne laverait un de ses vêtements en laine, m'enfin. Il suffit d'aérer...". Quelle référence, hein?

Rumex

Comme le rumex a les mêmes composants que rhubarbe et bourdaine, il suivra la même procédure (alcalin à froid). Je dois encore déterrer quelques racines au bord des champs près de chez moi. Photos sous peu. Le premier rumex que j'avais testé en 2012: rougeâtre en alcalin (> pH9).

S'il fait soleil et si on sèche les fibres au soleil, elles bleuissent. Et restent bleues après séchage, bien sûr.

Voir les résultats de Jenny Dean, dans son dernier livre "Heritage of colours".