5.10.2015 J'ai mis en scène nos essais au stage été 2014 avec Michel Garcia, pour avoir une vue synthétique. Comme un livre déroulant...
L'idée de Michel Garcia que chacun structure son environnement de teinture pour se l'approprier est super: il a conçu un "dictionnaire du voyageur", qu'on peut bien sûr utiliser à l'atelier avec des plantes achetées. Ce sera alors un "dictionnaire de mes couleurs".
Pour pouvoir maîtriser la teinture selon son environnement et ses propres goûts, il convient de se préparer un échantillon des couleurs, selon les mordants disponibles. Je m'inspire de la méthode de Michel Garcia, exposé dans son DVD Slowfibers. Procurez-vous ce DVD, la démonstration en images est éclatante. Petite remarque: ne vous attachez pas aux détails. Par exemple, notre labo de hobbyiste diffère: nous n'utilisons pas de plaque magnétique chauffante de labo, etc.
On sait que la cochenille donnera des roses et des rouges, ou que la gaude produira un jaune lumineux... ou du vert tendre... ou du jaune plus éteint. Car les couleurs se révèlent différemment selon le mordant que l'on a utilisé pour la fibre. Plutôt que de continuer à l'aveuglette, autant procéder une fois pour toutes à un test des produits que l'on a récoltés, dans l'eau que l'on utilise, avec les mordants communs comme l'alun ou le fer.
Que l'on utilise les plantes glanées, qu'on achète les plantes ou les extraits, le principe est le même: se préparer une page de tissu par colorant, où une série de mordants sont appliqués. Lorsqu'on teindra, le produit génèrera des valeurs différentes selon les mordants. Ci-dessous, chaque plante est déclinée en 6 valeurs de mordants. Avec 5 plantes standard, le teinturier amateur pourra jouer sur un vaste clavier...
En tant que testeuse, je pars dans tous les sens de recherches et ça me plaît. Si j'étais teinturière professionnelle, je sélectionnerais 3 ou 5 couleurs de base, que je déclinerais avec divers mordants et je les mélangerais: un beau jaune solide, un beau rouge solide et un beau bleu solide.
Je referais le travail ci-dessus avec ces 3 plantes de base, en les mélangeant dans des proportions précises et en les additionnant d'un ou plusieurs mordants. Mazette! Quelle palette!
Exploratrice curieuse, j'ai trouvé ici une technique superpratique pour mes pérégrinations en camping-car! Au moins un mois avant le départ, je me préparerai avant de partir des petits échantillons mordancés, je les sécherai à coeur, je les fixerai en bain ad hoc, puis reséchage. Je les empaquetterai avec mon barda. En journée, je glanerai des végétaux. Le soir, il me suffira de faire chauffer de l'eau et d'y faire une petite décoction minute du végétal glané, puis d'y tremper un échantillon mordancé pour voir se révéler sa couleur... ou pas.
Version hotel: il y a quasi toujours une petite bouilloire électrique et des tasses dans la chambre. Faites chauffer l'eau, versez-la sur la plante récoltée, ajoutez l'échantillon, couvrez la tasse pour conserver un peu de chaleur et tournicotez de temps en temps.
J'expose mon résumé ci-dessous, mais le procédé de gels mordants est clairement exposé dans les DVDs que Michel a tournés chez Slow Fiber (multilingues).
Les mordants sont, pour chaque carré que j'expose en plus grand ci-après:
Titane - Alun - Fer
Titane/alun - Al/fer - FE1
FE2/alun - FE1/alun - FE2
Ce procédé servira en récolte bucolique, hors de chez moi. Ici, on a utilisé des plantes achetées. On a rajouté 10% de galle dans quasi chaque bain. On pourrait rajouter du tara dans la cochenille pour des tons plus bleus. Les couleurs de cochenille sont bizarres ici à Tilburg, plus noirâtres que normal, selon MG. C'est un test, dans un environnement inconnu (on a partagé les essais entre participantes) avec une source d'eau différente de la mienne et des colorants différents. Avec ce premier essai, je peux me préparer ma palette par des tests ultérieurs dans mon propre biotope.
Voir chez Catherine Ellis une bande de tissu similaire, pour évaluer les tons selon sources (genêts) et durée d'extraction
En cumulant les essais ci-dessous avec la cuve indigo, j'aurai quasi toutes les couleurs. Sous les photos, j'ai souligné en gras les tons que je garderai. On pourrait les découper et s'en faire une roue chromatique. Les photos ne sont pas fiables, j'ai noté les couleurs réelles. Les fonds ont été nettoyés au savon de Marseille.
50 sophora 10 galle
Titane - Alun - Fer
Titane/alun - Al/fer - FE1
FE2/alun - FE1/alun - FE2
NB 2022. erreur technique, j'ai appris entretemps qu'il fallait bien bouillir le sophora pour obtenir le jaune brillant
Pratiquez cet exercice en groupe, car la préparation peut paraître fastidieuse pour une seule personne. En tout cas la première fois...
Prévoir
Préparez les 5 gels de mordants, en adaptant les produits à partir de la recette basique selon MG:
On appellera ce gel MA (Mordant Alun).
NB 2023 MG propose sur son compte fb d'épaissir un acétate de fer, par exemple, avec gomme arabique et bentonite (1 pour 1)
Suivre le même procédé avec 20g sulfate de fer dans le bol 2; pour les couleurs sourdes ou grisées (= MF pour Mordant Fer) ou 15g d'oxalate de titane dans le bol 3; pour des orangés (= MT). Répartir 2 tiers environ de la quantité de MA dans les bols 4 et 5: vous obtenez trois bols d'environ 65ml de mordant alun. Rajouter dans le bol nr 4 de MA un peu de MF; dans le bol 5 de MA un peu de MT. On aura des gels MAF et MAT, càd alun/fer et Alun/titane.
Libellez les bols MA, MF, MT, MAT, MAF
Mes notes de stage 2014 , à vérifier avec MG
On peut simplement peindre les gels de mordants, mais on pourrait aussi les appliquer au tampon. Pour pouvoir tamponner les gels, rappelez-vous les après-midi bricolage quand vous étiez enfant. Improvisez une forme avec:
Michel Garcia propose de récupérer de la frigolite, qu'il découpe facilement au cutter aux formes voulues. Pour un meilleur rendu, il colle du tissu dessus. Voir ci-dessous une photo extraite d'un pdf de son intervention au symposium 8ISS.
Ce procédé n'ouvre pas qu'au "dictionnaire de mes couleurs". Il peut être mis en place dans une démarche artistique. Il permet de développer de multiples tons avec un seul bain de teinture. En appliquant sur un seul pan de tissu, avant la teinture, des mordants différents, le teinturier pourra ne tremper le tissu que dans un seul bain (garance, disons) et obtenir des variations de ton superbes: de l'orange à l'incarnat en passant par le brun bordeaux.
Voir aussi Polychromatisme en monobain de teinture naturelle
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