Slow-dye

Teintures végétales pour les curieuses et les flemmardes

Récap' motifs sur tissu (coton, soie)

8.11.2023 Dans le contexte "retour à l'atelier", je récapitule toutes les techniques qui sont à notre disposition en teintures végétales pour produire des motifs sur les tissus. Et pourquoi je décatis.



J'ai plusieurs sources de tissus à travailler: des tissus neufs achetés, écrus ou blancs; j'ai aussi des tissus que j'ai tissés moi-même, que je pourrais améliorer; je dispose de tissus récupérés chez Emmaüs, de vieux linges de maison. Trois cas de figure, trois approches pour la préparation. Les jeux graphiques suivront la même procédure pour les trois.

Comme je tisse, je pourrai aussi produire des motifs au travers de la technique de l'ikat.

Je dois décatir soigneusement les tissus du commerce, plus hardiment que les fils que j'ai préparés il y a quelques jours, car les apprêts d'industrie sont souvent plus lourds. Je peux simplement laver mes tissus tissés main, car les fils ont déjà été bien lavés au départ. Les linges anciens doivent aussi être décatis à coeur, sans imaginer que les lavages successifs les auront décatis: à l'inverse, on a accumulé dans la fibre des résidus de produits, non rincés.

Décatir revient à décaper les tissus plutôt que de simplement les laver (« scouring » en anglais, plus radical que le simple lavage machine) 

Décatir

Je revois mes notes de rappel, fin 2021, que j'améliore d'autres infos qui me plongent dans de gros doutes, pour le coton en tout cas.

Je m'étais décidée pour une recette standard pour cotons de:

  • 10 litres d'eau pour 200 à 400g de tissu ou fils,
    1 cuill. c. de liquide vaisselle ou de savon de Marseille liquide (doubler pour les 400g)
    1.5 cuill. c. de cristaux de soude (doubler pour les 400g).

Soie et laine sont simplement lavés, pas décatis.


Je retrouve mes notes en stage avec Michel Garcia qu'à bouillir en bain alcalin (la soude) des amidons -- les tissus sont souvent nappés d'amidon avant la commercialisation -- , on les fixe encore plus dans la fibre! Mauvais plan, donc. Enfin, si ça s'avère, car je prends tout avec des pincettes. En attendant le résultat de ses recherches pour obtenir un décatisseur universel (enzymatique), il suggère un bain de son de blé, tiède vers chaud mais non cuit (pour préserver les enzymes qui décomposeront les cires, les pectines, les amidons). J'ai dû mal suivre la procédure, car les teintures ne donnent ni mieux ni moins bien avec ce son de blé.

 

 

Solution motifs ou effets graphiques

J'utilise le terme "tamponnant" pour la facilité: en fait on tamponne, on dessine au pinceau, on sérigraphie, on thermofaxe... Plein de solutions. On peut tamponner sur le tissu, ou tamponner des feuilles ou des plumes qu'on dépose sur le tissu, etc...

On peut tamponner des couleurs (en gel ou "pâte d'impression") sur un tissu mordancé et fixé, puis vaporiser. On peut faire pareil sur un tissu non mordancé, en ajoutant du mordant dans le gel. On peut tamponner de l'enlevage, càd une décharge de mordants, avant de fixer le tissu en bain de craie puis de le teindre.

Les détails sont répertoriés dans mon billet de 2015: Pâtes d'impression & d'enlevages

On peut aussi jouer de la réactivité des colorants aux mordants : on mordance le tissu par zones, en tamponnant les unes au fer, les autres au titane, les dernières à l'alun et enfin d'autres encore au fer ET à l'alun. On tamponne sous forme de gel (ou pâte de mordant), bien sûr, sinon cela fuserait trop. On fixe (bain de son ou vapeur). On peut faire pareil pour des écheveaux, pour qui on a aussi la solution de tremper des parties d'écheveau dans chaque mordant.

Les détails sont dans mon billet 2015 : dictionnaire du voyageur de Michel Garcia

 

On peut pratiquer des réserves physiques ou chimiques. Physiques: c'est le shibori bien connu (ou "tie-dye" à l'africaine). On noue, on fronce, on serre entre deux planches ou on roule sur un cylindre avant de teindre. Des zones cachées ne seront pas atteintes par la teinture.

Chimiques: la formulation dépend de la teinture. La réserve la plus connue est le batik, à la cire

Pour l'indigo, par exemple, MG propose de préparer "en dissolvant 80g de gomme arabique dans 200ml d’eau, puis on ajoute 40g d’argile bentonite" (source: son compte facebook, 2021). Une autre recette ici, avec sulfate de magnésium.

John Marshall utilise pour l'indigo une pate de nori. $$TL$$ eau et amidon de rémy cuit en pate collante, puis additionné de cristaux de soude dilués  et cuits jusqu'à ce que devienne collant.

Ikat

Un tisserand peut jouer aussi sur le fil de chaîne, avant de tisser. Autre technique, la plus simple: on peut générer des chaines bicolores (souvent bleu/blanc) par réserve physique. En ikat, on enferme les zones à protéger de la couleur par des noeuds très serrés, sur l'écheveau (en shibori, on fait pareil mais sur un tissu fini).

Les zones liées empêchent le mordant et la couleur de pénétrer. Quand l'écheveau (pour un ikat de trame) ou la chaîne (cas d'un ikat classique, de chaîne) sont trempés dans le bain voulu, elle sortira zébrée selon l'ordre des liens.

La plupart des tisserands se plaignent de chiffonner leur longue chaîne lors de cette opération (tout comme 'est possible en peinture de chaine classique) - opération qui prend alors bien plus de temps qu eprévu puisqu'il faut réourdir tout le bazar chiffonné. Bonnie Tarse a inventé une solution de "presqu"ikat" qui règle ce problème. Voir dans le billet ad hoc.

 

Batik ou peinture sur soie: astuce maligne et impro pour tendre le tissu

voir à la min 3.50 d'une vidéo sur l'artiste Michael O'Connell: "wax resist batik artist's studio, home and textiles"

Supermalin pour tendre un tissu avant de le travailler:

  • (photos 1 et 2) de simples clous dans des planches, les bords du tissu sont piqués dans les clous;
  • (photos 3 et 4) le tissu est tendu par une planche tenue sur la tranche.


  


   


   

 

Ce sera utile si je veux utiliser un pinceau ou tjanting pour jeter des calligraphies sur le tissu. Pour travailler à la table chaude pour encaustique, j'apprêterai le tissu avant. Spray d'amidon, qui passera à l'eau tiède (pas chaude, sinon la cire se barre..).