25.12.24 Mon résumé des monobains acides que Michel Garcia a médiatisés.
22.1.2025 A ce jour, cette page récapitulative inclut tous les brouillons depuis 2014, mais il manque des liens, des photos, des bouts de phrase. Bientôt, elle sera finalisée et structurée en un pdf interactif, fascicule nr 6 de Slow-dye: teintures naturelles pour les curieuses et les flemmardes
Sommaire. Définition - Quelles fibres ? - Quelles plantes ? - Procédé, en gros
La mode veut qu'on teigne sans mordant. "La mode": ce sont des rumeurs propagées sur les réseaux sociaux, sans réflexion, sans connaissance, sans appel aux experts. Je pense que c'est une erreur de suivre une blonde du net et de se compliquer la vie sur la foi de rumeurs infondées, mais ça ne regarde que moi, n'est-ce pas. Il existe quelques techniques sans mordant minéral: mordancer au symplocos (bonne mauvaise idée, qu'on prie les teinturiers occidentaux d'oublier), au lycopode, ou... mordancer avec la technique que Michel Garcia a inventée, les monobains acides (acides citrique et gallique, eau chaude et plante tinctoriale).
En fait, Michel Garcia a analysé les pratiques des peuples premiers et, combinant la tradition avec nos connaissances modernes et son génie de la chimie verte, il en a tiré un procédé où l'on mordance les protéiques sans mordant minéral, ni alun ni fer; on combine de l'acide citrique et des tanins à la couleur, dans un seul bain.
Selon Jenny Dean , cette technique vient de Koekboya, mais je ne l'ai pas retrouvé en lisant ce livre. Cela doit vraiment être une trouvaille de Michel Garcia, qui a l'art de moderniser les techniques de nos anciens. D'après Garcia, certains tanins se fixent bien sur les protéines (laine et soie), mais moins bien que sur le coton, donc on augmente le pouvoir astringent des tanins avec de l’acide citrique ; on peut ainsi faire du monobain sans mordançage préalable. Cette utilisation de tannins mariés aux acides organiques est utile quand le teinturier ne dispose pas d'alun minéral ni de bio-accumulateur. Le tanin fera en outre office d'antiUV, après teinture, sur le tissu final.
Cette technique est une merveille, car elle permet de produire des mélanges de couleur incluant le bleu s'il provient du carmin d'indigo. Voir ci-dessous les combinaisons possibles chez Couleur Garance. Le seul hic pour moi: les tons rouges de garance en acides sont souvent trop orangés pour mes goûts, je dois les passer un court instant en indigo léger pour les carminer. Je dois encore expérimenter.
brouillon du schéma qui sera peaufiné dans le livre
(illus: fil ou tissu; végétal ou insectes - oh que je dessine bien; et c'est rien de le dire quand on essaye de lire mon écriture, pardon, j'ai fait de mon mieux)
en teinture classique: le bain 1 de mordançage prend une heure à chaud
le bain 2 d'extraction: 1 heure à chaud (parfois moins)
le bain 3 de teinture proprement dite : 1 heure à chaud
le coup de génie de Michel Garcia: les 3 bains en un seul!
Il se dit que les teintures en monobain acide sont plus résistantes à la lumière, mais moins résistantes au lavage que les teintures en bouillons classiques. Serait-ce que les utilisateurs n'emploient pas de savon neutre, par la suite? Finalement, peu importe, puisqu'on teint au principal de la laine en monobain. Or, vous savez que la laine vierge ne se lave pas, n'est-ce pas, mais s'aère simplement?
Monobain: nul besoin de mordancer la laine ou la soie, on joindra des tanins (acide gallique en extrait) dans un bain de teinture (produits bruts ou extrait colorant), acidifié par l'acide citrique. Le résultat est aussi solide et durable que l'ancienne technique à l'alun (minéral). Selon les tests de M. Garcia, la couleur est même plus stable!
Mon abréviation: MBA ci-dessous
Les protéiques, càd les laines (ce qui inclut les poils comme le chamelon, etc) et la soie.
Excellente piste graphique chez Catharine Ellis, fin 2021: elle tisse aussi, parfois en mélangeant coton et laine. Elle utilise les monobains acides, qui ne prennent que sur la laine, pour des effets de teintures différenciées sur ses tissus coton/laine. Voir d'autres exemples sur la page ad hoc, chez elle. En fait, elle a préparé une pâte d'impression au vinaigre sans même procéder à l'extraction de la plante: la plante moulinée finement, un peu d'eau et de vinaigre (et pas de tanins? elle a dû oublier dans le texte):
Cas particulier du carthame: il a pris du jaune sur la laine; du rouge sur le coton. Il faut connaître le procédé d'extraction des ligules du carthame pour comprendre, ce sera pour un autre chapitre: les rouges.
voir les densités de tons dans une vidéo YT de Michel Garcia:
Dans les plantes que j'ai à l'atelier, je repère lesquelles contiennent des quinones, qui pourraient les rendre aptes au monobain acide de Michel Garcia. Dans la table des matières du livre de Dominique Cardon, je vois la garance, les rhubarbes et la bourdaine (anthraquinones) ; les pétales de carthame ( ?), l'orcanette (naphtoquinone), le noyer (naphto = juglone), le henné ( naphto = lawsone). Le rumex contient aussi des anthraquinones (émodine et franguline, comme la rhubarbe et la bourdaine). Aussi les lichens, les insectes comme cochenille et lac.
NB 2022. Je viens de revisionner le merveilleux DVD de l'ami Garcia, il mentionne qu'on peut pratiquer les monobains acides sur les jaunes de gaude etc (flavo) à condition de ne pas descendre sous un pH de 6. Je viens d'essayer avec du bois jaune, extrait en alcalin et basculé en pH 6: superbe jaune lumineux.
Cité dans une interview 2023 chez ArtEcovert, avec Michel Garcia: "anthraquinones: garance, gaillets, etc; millepertuis, certains eucalyptus (écorce côte d'azur, anthraq brunes), lapatcho, cochenille - rhubarbe et famille, bourdaine, nerpruns - naphtoquinones: henné, brou noix, orcanette"
J'ajouterais millepertuis, cachou si j'en crois les libellés de prêts à teindre en vente chez Couleur-garance. Je pourrais m'inspirer des mélanges suivants chez eux, contenant systématiquement acides galllique et citrique. NB. Le carmin d'indigo cité ci-dessous est une forme acide du bleu d'indigo prétransformé,qui ne s'achète pas n'importe où - voir le paragraphe ad hoc):
NB. Commentaire geek de la teinture: si j'ai bien noté (?? revoir la vidéo), ce monobain est efficace pour toutes les autres plantes que quinones à condition de les avoir mordancées au titane (on aurait alors des orangés?). Commentaire pour les geeks, car 1/ titane inquiètera les novices (à tort, mais c'est comme ça) et 2/ titane difficile à trouver. Dans la vidéo il me semble que laine et gaude de titane en monobain acide = plus orange bronze que l'autre version.
Les fibres ainsi teintes en monobain acide sont solides à la lumière et au lavage, si l'on utilise un détergent neutre. Elles sont même plus solides que les teintures à l'alun sans tanin. Dans une vidéo chez SlowFiber, Michel Garcia montre ses tests en divers mordants que les Anciens auraient pu utiliser, dont la combinaison de tanins et de source acide (ses monobains acides). Il a fait tester la solidité lumière de lac, cochenille, garance en a) monobain b)mordant lycopode puis bain acide c) mordant alun 10% puis bain. Minute 22 de la vidéo:
Il se pourrait que la solidité lumière soit due aux tanins et à l'ambiance acide de ces monobains pour protéiques. C'est après avoir vu cette vidéo que je rajoute systématiquement des sources de récup' de tanins dans les bains pour les rouges (infusettes de thé passées, même si ce n'est pas gallique - ce que je fais aussi pour les bouillons et pour les cellulosiques). Je n'ai pas encore essayé avec les autres couleurs.
La recette originale prévoit de cuire 1h à 80°C, pour quasi tous les colorants. En version écono-logique, je réduis un peu la température. Nous n'avons pas les mêmes impératifs professionnels que les clients de Michel Garcia.
En guise de test, j'ai procédé différemment : j'ai versé dans 5 litres d'eau bouillante les plantes broyées finement (racine de rhubarbe), le tanin (30% PDF puisque noix de galles broyées et non acide gallique), et du vinaigre. Demander à Michel Garcia pourquoi l'acide citrique, mais je pense que c'est pour satisfaire la mouvance américaine naturo qui croit que c'est un produit extrait du citron. Hihi.... Ou alors l'acidité est plus stable au citrique?
J'ai placé la laine déjà humide dans une poche de nylon (récup'), afin qu'elle ne soit pas contaminée par des petits morceaux de rhubarbe. Je l'ai trempée dans le bain. J'ai mis un poids (assiette ébréchée). J'ai fait chauffer à 80°C, couvert, ôté du feu, couvert d'une bonne couverture en laine pour garder la chaleur plus longtemps. Principe de la marmite norvégienne. Le résultat était OK.
Il m'est arrivé d'être à court de galles ou d'acide gallique. J'ai remplacé par plein de thé noir (je garde mes infusettes usagées, conservées au sec - j'imagine qu'une infusette d'1.2 grammes garde 0.3g de principes actifs, je calcule donc combien il m'en faut pour ce dosage de fibres: beauauaucoup! ).
J'apprends chez Catharine Ellis que l'application du henné en art capillaire fonctionne à peu près comme les monobains acides, mais à froid: "comme teinture pour les cheveux et comme mehndi (teinture temporaire pour la peau), (elle) est la même : la matière végétale finement broyée est mélangée à de l'eau pour former une pâte, acidifiée avec du jus de citron, et laissée sur les cheveux ou sur la peau pendant plusieurs heures. Lorsque la pâte est lavée, la couleur reste. Ces teintures sont considérées comme non permanentes pour la peau et les cheveux et peuvent être répétées une fois que la couleur s'est estompée".
Ce qui me donne envie de 1/ produire un extrait dense de quinone 2/ y ajouter citrique et tanins 3/ y laisser prendre couleur, à froid, de la laine que j'aurai laissé dans de l'eau vinaigrée la nuit précédente. Qui sait si ça prendra? Je ne suis pas pressée, or le temps remplace *parfois* la chauffe.
Noté lors d'un stage, mais cela me paraît bizarre (coton en acide?): le bain peut être utilisé ensuite pour des cellulosiques, en deuxième bain, mais elles devront avoir été mordancées au préalable.
Pour des pistes plus tutos, suivez l'une des vidéos de Michel Garcia chez Slowfiber - désormais en streaming 12€ location 48€ achat.
J'ai mis en scène des tests d'un stage en 2015, avec Michel Garcia chez Valentine Donck. Echantillons restés sur une étagère dans mon atelier, mais pas plein soleil. Ils ont bien supporté l'outrage du temps. Une partie des tests sur la photo sont faits avec cette technique de monobain:
Ah que la photo est trompeuse en soi... On n'y voit pas la chatoyance des couleurs.
Sur le plateau, de gauche à droite, sens des aiguilles d'une montre. Je note d'abord les codes pour les MBA, puis les AA. Je mentionne "extrait" ou plante entière concassée selon les cas; le coton ne teint pas en monobain acide -> "AA" = mordançage coton ou lin à l'acétate d'alun.
3 - MBA garance (extrait) //
5 - laine MBA cochenille (extrait) puis bain alcalin pour carminer le ton //
13 - laine MBA rhubarbe (racine, plante broyée) //
14 - laine MBA d'orcanette (plante broyée), puis trempée 3 * dans l'indigo - vert anglais très profond
Hors MBA: 1 - coton AA grenade bouillon classique (plante) // 2 - coton AA garance (extrait) // 4 - laine cochenille au symplocos dans bain de garance (extrait) // 6 - laine symplocos dans cochenille (extrait, 3ème bain, léger) + bain indigo // 7 - coton AA dans extrait de campêche très dense // 8 - coton AA dans cochenille très dense // 9 - coton AA dans extrait de lac très dense // 10 - coton AA dans extrait sophora // 11 - coton AA dans gaude (plante ) // 12 - coton AA dans fin de deux bains: extrait campêche et extrait sophora // 15 - coton AA dans brou de noix (je crois me rappeler que l'alunage du coton empêche la prise de cette couleur, ça expliquerait le ton très discret, j'obtiens des plus bruns sans mordancer)
Quelques tests fin 2015 chez moi, pour vérifier les procédés
De gauche à droite
(rappel 2022: on mordançait au symplocos à 33% en 2015, c'est fini!) :
Mes notes. Dans de l'eau du robinet, acidifiée à l'acide citrique (pH 4), 10g de noix de galles moulinées et 80g d'orcanette fraîche récolte (WK) + 50g d'étamine de laine non mordancée et 30g de cheesecloth de coton (AA), neutralisé par un bain rapide de lessive de cendres. Je monte à 70°C en ½ heure. J'arrête, je mets le couvercle. La laine est déjà bien prune grenat, superbe ! Le coton, on s'en doute, reste clair (rose indien). Ou bien est-ce que l'étamine a vite pris le max ? J'ajoute à ce moment un ruban de weynsleydale non lavé, protégé dans un bas nylon large. Je laisse le tout 1h, sous couvercle. Le weyns est sorti d'un ravissant mauve grisé.
NB sans photo: Coton pérou dans seau froid de jus de bouleau pH 9, macération alcaline de 24h: rosé foncé vers rouge
De gauche à droite:
10 = petit bout de ruban (de quelle laine)?? NM dans jus de bouleau à froid 24h, macération alcaline
11 = Ruban leicester en MBA brou de noix 80% PDF 1h 70°C
mes notes: 100gr de brou de noix (CG, sec), dans eau vinaigrée -> pH 4.5 + tanins de galle + nouet avec ruban laine NM et bout étamine NM; chauffé 70°C; 10 min; arrêt; 12h à couvert.
12 = Ruban weynsleydale symplocos + bain froid de campeche et de jus de bouleau 36h, avec oxydation 10 min à heure 8 et multiples (petit bout au milieu = teinte après 12h, gris encore).
Mes notes: campeche à froid, mélangée à extrait de bouleau, dans bocal en verre: sorti gris plus que bleu -> dans une fin de bain symplocos froid 12 h. Après 12h dans le bocal: devient bleu gris; retour bocal 24h: beau bleu gris aviateur
13 = Deuxième bain de nr 7, soit MBA orcanette devenu bien moins que 100% PDF (30min à 50°C). Très fade, donc versé dans fin de bain nr 2 de MBA de garance 100% PDF puis bain alcalin
14 = ruban alpaga en garance classique
15 = ruban weynsleydale en garance classique
16 =Ruban leicester en garance classique
Notes sous les photos ci-dessous. Les nombreux "mordancé alun 8-CT 4" le sont par erreur puisqu'inutiles sur MBA, mais je n'avais que cela sous la main... "EM": une expérience de lavage aux bactéries EM vendus par ma soeur.
retour aux archives